Jean-Baptiste Willermoz, pourtant fervent catholique mais avec une intelligence remarquable, avait compris combien il était extrêmement dangereux de mêler la religion avec la franc-maçonnerie, notamment dans les grades symboliques qui sont, et doivent rester, une propédeutique du christianisme, un séminaire prudent et mesuré dans lequel est développée une approche toute intérieure et intime des mystères de la Révélation.
Car la foi, et son corollaire, c’est-à-dire la rencontre dans le coeur avec le Divin Maître Réparateur, est un chemin constitué par le fruit de la réunion de l’âme avec le Ciel, réunion faite de mouvements constants, de variations qui sont la vie propre de l’esprit, esprit qu’’il ne faut surtout pas brusquer, ni auquel il ne convient d’imposer un rythme brutal, et encore moins contraindre sous le poids d’une dogmatique rigide qui n’a aucunement sa place au sein de l’initiation, d’autant que le christianisme auquel se réfère l’Ordre, selon Joseph de Maistre, relève du « christianisme transcendant » participant de vérités aujourd’hui oubliées par l’Eglise et que cette dernière regarde même comme des « erreurs » en les condamnant de par le fait qu’elle les ignore ou ne veut plus les connaître, ainsi que l’explique Willermoz (Cf. Cahier D 5e , Bibliothèque Nationale de Paris, 1806-1818).
Lisons donc avec attention les sages conseils de Willermoz, pour s’y conformer et en observer les principes :
« Du moment qu’on mêlera la religion à la maçonnerie dans l’O. symbolique on opérera sa ruine ; je la vois même se préparer en plusieurs endroits par la multiplicité peu sévère […] et par le zèle imprudent qui en vue du bien du prochain se livre a l’esprit de prosélytisme ; pour faire préférer notre régime nous mettons à découvert ses principes et son but particulier nos discours oratoires deviennent des sermons, bientôt nos Loges deviendront des églises ou des assemblées de piété religieuse….
[…]
Ce danger mon ami qui peut paraître chimérique est bien plus prochain qu’on ne pense, si on n’y met promptement ordre…. »
(Lettre de Willermoz à Bernard de Türckheim (1752-1831), du 3 février 1783, in Renaissance Traditionnelle n°35, juillet 1978, p. 179).